Extrait :

« ...Un nombre considérable de Munichois gagnèrent leur vie comme marchands d'art jusqu'en juin 1948, date de la réévaluation de la monnaie. Parmi eux, seule une minorité possédait vraiment des oeuvres, la plupart des autres étaient surtout des intermédiaires qui faisaient circuler des listes de tableaux censément en vente par quelqu'un qu'on ne pouvait rejoindre que par d'autres intermédiaires.

Parfois, ces listes nous donnaient de précieux indices. En 1947, il y eut une affaire dans laquelle une liste, ayant influencé un marché conclu dans la rue, contenait un objet semblable à l'une des peintures volées de Linz. On la trouva bientôt chez un médecin qui jurait l'avoir héritée de ses parents. En fait, il venait de l'acheter d'un fabricant de piano, collectionneur enragé, qui l'avait obtenu d'un marchand d'instruments de musique. Cette personne avoua volontairement, après quelque hésitation initiale, que le fabricant de piano lui avait acheté non pas une, mais neuf peintures qui étaient toutes, il le savait, pillées...

Les intermédiaires n'étaient pas toujours aussi nombreux et les résultats aussi concluants; il était impossible de prévoir. Retrouver une peinture ne suffisait pas, il fallait à chaque fois retracer l'historique du cas, avec toutes ses ramifications. Parfois, il fallait des mois avant de récolter assez de preuves pour résoudre une affaire.

Sauf en de rares cas, nous avions pour règle de ne pas poursuivre les gens en possession de tableaux volés. Cette politique explique en fait notre succès. Un individu pouvait compter sur notre clémence s'il avouait tout et remettait volontairement son bien mal acquis. Nous ne portions la cause devant le tribunal militaire quand cas de mensonge flagrant. »

Tiré du rapport de :
Edward Breitenbach
Chef, Section des Monuments et des Beaux-arts
Ancien officier des Monuments, Beaux-arts et Archives
Pour la Bavière méridionale
Bad Nauheim, le 30 juin 1949.