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La formation en entreprise au Québec : un état des lieux

Colette Bernier, Département des relations industrielles, Université Laval

La formation en entreprise au Québec : un état des lieux

Colette Bernier, Département des relations industrielles, Université Laval

Il n’existe pas au Québec d’enquête générale sur la formation en entreprise sauf la fameuse enquête de la commission Jean. Depuis, comme on le verra, diverses enquêtes canadiennes ou études de cas québécoises n’ont fait que confirmer les données de cette étude. Pourtant, divers auteurs prétendent que nous serions dans une phase de modernisation des entreprises caractérisée entre autres par l’importance accrue de nouvelles formes d’organisation du travail et qu’un nouveau modèle d’entreprise serait en train de surgir au cœur duquel la formation prendrait une place prépondérante.

Ce papier tente de réfléchir à cette question sur la base d’une revue d’études récentes. On y voit que le modèle traditionnel basé sur un faible investissements des entreprises en formation et la prédominance de la formation sur le tas persiste pour diverses raisons.

La revue des études montre que la situation du Québec traditionnellement a été caractérisée par un faible recours des entreprises à la formation. Le plus souvent, il s'agissait de formations sur le tas visant une adaptation rapide du travailleur ou de la travailleuse à son poste de travail. La persistance de ce modèle traditionnel relève selon certaines études du fait justement que l'organisation du travail est encore dominée par le modèle taylorien. On pense que le régime des relations industrielles basé sur la négociation des conditions de travail au niveau de l'entreprise a constitué un frein au développement de la formation.

Plusieurs changements à l'organisation du travail montrent cependant que la formation devrait devenir centrale aux stratégies de gestion des ressources humaines des entreprises. Les études à ce niveau restent cependant de l'ordre de la prescription. Nous n'avons relevé que trois études qui, comme telles, font état du développement de formations novatrices au Québec. Dans ces cas, il s'agit donc de tendances de développement possibles plutôt que d'une réalité bien ancrée.

Puisque certaines études parlaient de la nécessité de rapprochements de l'école et de l'entreprise pour la mise en place de formations novatrices, la dernière partie de notre revue d'études a consisté justement a examiner l'évolution des liens entre l'école et l'entreprise au Québec. On y constate d'une part de très évidents efforts de la part des maisons publiques d'enseignement pour se rapprocher des entreprises. Notons la nouvelle approche par compétences adoptée pour les programmes de formation du réseau public, l'établissement de centres spécialisés dans les cégeps et aussi le développement de la formation sur mesure. D'autre part, quand on examine les apports des entreprises dans un rapprochement avec l'école, force est de constater qu'elles continuent à envisager l'école comme devant leur fournir une main-d'oeuvre qualifiée mais qu'elles tardent à envisager un apport actif de leur côté. Ainsi, les différents régimes d'apprentissage développés au Québec n'ont pas encore pris leur envol, faute entre autres d'une participation active des entreprises. Comme le dernier régime proposé par la commission des partenaires concerne la formation de la main-d'oeuvre (et non plus de la relève), peut-être ouvrira-t-on une brêche en la matière.

Il est donc encore trop tôt, à notre avis, pour conclure à une modernisation des entreprises. Comme le montrait une étude de Betcherman et collaborateurs (1996) sur la formation en entreprise, peut-être nous dirigeons nous vers une plus grande segmentation des entreprises à cet égard.